La Maladie Rénale Chronique (MRC) affecte environ 10 % des personnes vivants avec le VIH (PVVIH). De nombreux antirétroviraux (ARV) sont à adapter au débit de filtration glomérulaire (DFG) ou à éviter lorsque le DFG est en deçà de 70 ou 90 mL/min. La HAS recommande le CKD-EPI pour le dépistage et le suivi de la maladie rénale. Cependant, la formule Cockcroft-Gault (CG) reste recommandée pour l’adaptation posologique. L’objectif de notre étude est d’évaluer la performance des estimateurs pour identifier les PVVIH dont le DFG est inférieur à 90 mL/min, et 70 mL/min.

Évaluation du biais, de la précision, de l’exactitude (valeurs estimées à±30 % de la valeur mesurée) et des capacités de classification des eDFG (CG, CKD-EPI indexé et non indexé à la surface corporelle [SC]) par rapport à une mesure du DFG par la clairance plasmatique au iohexol (DFGm) chez des PVVIH. Deux cent trente patients (âge moyen 48 [±10] ans, sex-ratio H/F 4,5/1, 212 [92 %] traités par ARV, 184 [84 %] avec CV<40 copies/mL) ont été inclus.

Le DFG mesuré moyen est de 95±28 mL/min/1,73m². Les biais moyens sont respectivement pour CG indexé à la SC, CKD-EPI 4±26 et 5±21L/min/1,73m². Le CKD-EPI est significativement plus exact que le CG (82 vs 75 %). Pour une valeur de DFG inférieure à 90mL/min/1,73m² (n=71), seulement 52 et 36 % des estimations étaient concordantes avec le DFGm respectivement pour CG indexé à la SC et CKD-EPI. Pour une valeur de DFG<70 mL/min/1,73m² (n=27), seulement 30 et 22 % des estimations du DFG étaient concordantes avec le DFGm. La concordance entre le CG et le DFGm est meilleure sans indexation à la SC, de 58 et 43 % à respectivement 90 et 70mL/min.

Malgré une meilleure estimation du DFGm avec CKD-EPI que le CG, le CKD-EPI ne permet pas de mieux identifier les patients dont le DFG est inférieur à 90 et 70 mL/min/1,73m², avec comme impact une prescription inadaptée des ARV, potentiellement associée à un risque accru de toxicité.